Étiquette : PolicierPage 1 de 4
« La scène qu’il découvrit en bas était inimaginable. Des milliers de corps nus allongés à perte de vue sur des palettes de bois, jetés en tas comme des mannequins dans une usine de poupées, bras et jambes entremêlés, étrangement lumineux, à peine humains. Les vapeurs de désinfectant masquaient les détails […]. Des zombies en combinaison de protection bleue, sans visage derrière leur visière en plastique teinté, évoluaient au ralenti entre les volutes de fumée, à la façon des astronautes sur la Lune, sortant les cadavres des fourgnons pour les empiler sur de nouvelles palettes. »
« Il contacta sa fille sur Skype ce soir-là. Elle apparut sur l’écran, son bébé dans les bras. Servaz ne s’était toujours pas habitué à ces technologies qui permettaient de relier Toulouse à Montréal et d’entrer dans l’intimité de chaque foyer, qui rapetissaient le monde au point de lui ôter une bonne partie de sa magie. Il y voyait un progrès mais aussi un terrible danger –celui d’un monde sans murs, sans portes, sans recoins où se cacher, sans possibilités de penser à l’abri du bruit et des injonctions. Un monde livré à l’instantanéité, au jugement des autres, à la pensée unique et à la délation, où le moindre geste s’écartant de la norme vous vaudrait d’être suspect et par suite accusé, où la rumeur et les préjugés remplaceraient la justice et la preuve, un monde sans liberté, sans compassion, sans compréhension. »
« Il capta son reflet dans la vitre et recula d’un pas, s’éloignant de tout ce qu’il connaissait pour s’enfoncer dans la peur panoramique qui s’ouvrait devant lui. »
« Sonya a probablement l’âge de Jim, à peu de chose près, même s’il n’oserait jamais dire une chose pareille. Quand on devine l’âge d’une femme, il vaut mieux enlever au moins une décennie. Ou mieux encore – la fermer, c’est tout. »
« Toulouse, périphérique, sortie 16. Les trois témoins de l’exécution de sang-froid d’une joggeuse deviennent les cibles du tueur en série. Pris au piège d’un stratagème macabre, ils sont menés dans un jeu de piste au bout duquel ils n’ont qu’une chose à perdre : la vie. »
« Hadès pencha la tête sur le côté. Ses cornes frémirent, s’allongèrent et dessinèrent des sourires pervers au sein des volutes d’encens.
– Toi ? Tu tuerais ta sœur ?
– Nous n’avons pas à mourir tous les deux.
– Ariel ! Ils ne nous laisseront pas vivre de toute façon !
– […] Je tente ma chance. Donnez-moi ce putain de couteau. Je le ferai…
Les mains tordirent ses bras dans son dos. On la redressa pour exposer sa gorge. Les individus qui tenaient Ariel le lâchèrent. […] La cloche tintait comme une folle, un pouls proche de l’orgasme, dans la lumière entièrement rouge désormais.
– Donne-nous notre meurtre. Divertis les dieux.
Il tendit la lame à Ariel. »
« Sous les climats humides, un cadavre se décompose vite. Le corps gonfle. La peau se relâche et part en lambeaux. Les cheveux et les poils tombent. La graisse et le muscles se liquéfient. Les viscères éclatent. Si le mort se trouve en position verticale, le rectum, par exemple, peut descendre, se détacher de l’anus. À un moment donné, […] le corps explose. »
Keigo Higashino a reçu le prix Polar international de Cognac pour ce livre. La première chose que j’ai retenue en fermant ce livre, c’est la question suivante : pourquoi,…